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Principales maladies du couvain chez l’abeille mellifère

L’ascosphérose (Ascosphaera apis), une maladie fongique

Communément appelée « mycose », « maladie du couvain plâtré », ou « maladie du couvain calcifié », l’ascosphérose est provoquée par le champignon Ascosphaera apis. L’ascosphérose est rarement responsable d’une mortalité importante allant jusqu’à la perte de colonies, mais perturbe fréquemment le développement de ces dernières, ce qui se traduit par une perte économique importante pour l’apiculteur. Il ne s’agit pas d’une maladie réglementée.

Les spores fongiques sont introduites dans la colonie par des ouvrières butineuses. La transmission des spores aux larves se fait par le biais de nutriments régurgités. Les spores sont résistantes dans le milieu naturel pendant environ 15 ans !, si bien que l’on considère que les spores sont systématiquement présentes dans l’environnement et dans la ruche, et que le développement de la maladie n’est possible que lorsque des conditions particulières sont réunies : notamment lorsque la température du couvain est inférieure à 32 ° C pendant plus de deux heures , les spores d’Ascosphaera apis germent, le plus souvent dans l’intestin des larves. Le mycélium ainsi formé se développe et provoque la mortalité du couvain. L’ensemble du couvain, ouvert ou fermé, correspondant aux larves d’ouvrières ou de reproducteurs, peut être touché. Les larves sont infectées au stade non operculé et meurent généralement autour de la période d’operculation . Dans un premier temps les larves présentent un aspect « cotonneux », lié au développement des filaments mycéliens. Puis, les larves durcissent et se momifient. Elles présentent une couleur blanche et une consistance crayeuse, d’où le nom usuellement donné à la maladie.

Le développement de spores « + » (ou « mâles ») et de spores « - » (ou « femelles) sur la même larve aboutit à la reproduction sexuée du champignon. Plus de 100 millions de spores peuvent être produites par larve contaminée, favorisant la propagation de la maladie au sein de la colonie. En cas de reproduction sexuée, les larves affectées sont ponctuées de noir ou sont entièrement noires car les corps de fructification où sont produites les spores sont noirs.

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La germination des spores est favorisée par de fortes variations de température, avec notamment une température basse la nuit, et une humidité importante. Le taux de prévalence de l’ascosphérose est le plus important à la fin du mois d’avril. Les larves de mâles sont plus affectées que les femelles : en effet leur position à la périphérie du cadre les rend plus vulnérables aux variations de température. Plus le nombre de spores dans la ruche est élevé, plus le risque de développement de la maladie est important. L’utilisation de matériel et de cadres non nettoyés et non renouvelés est un facteur de risque majeur.

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Diagnostic

Un couvain clairsemé (ou "en mosaïque") comportant de beaucoup d’alvéoles vides, constitue un signe d’appel . Les abeilles nourrices évacuent en effet une grande partie des larves momifiées. Par ailleurs, on peut observer une répartition aléatoire de larves d’âge différent puisque la reine pond à nouveau dans les alvéoles libres. Le couvain clairsemé n’est pas un signe clinique pathognomonique, puisqu’il peut être associé à d’autres maladies du couvain ou encore à des troubles de la fertilité (notamment dans un contexte de consanguinité). D’autre part, une condensation peut être observée au sein de la ruche, due à l’humidité excessive. Enfin seul l’examen direct rigoureux des larves, à l’aspect cotonneux ou momifié, permet le diagnostic de certitude.

Traitement

Il n’existe pas de traitement thérapeutique de l’ascosphérose. Seules des mesures prophylactiques ont prouvé leur efficacité. On peut par exemple citer :

- Le positionnement de la ruche dans un espace ensoleillé et sec, avec notamment une ouverture orientée vers le sud ;

- L’étanchéité du toit et une surélévation par apport au sol, de façon à limiter l’introduction de l’humidité, ainsi qu’une inclinaison de la ruche vers l’avant et une bonne aération afin de favoriser l’élimination de l’eau ;

- Un renouvellement régulier des anciens cadres, un nettoyage fréquent du plancher de la ruche ;

- L’élimination des colonies sévèrement infectées et affaiblies.

La loque américaine 

une maladie bactérienne L’agent causal est la bactérie Gram + Paenibacillus larvae. Il s’agit d’une affection grave du couvain operculé, aux conséquences économiques importantes. C’est une maladie réglementée qui impose la déclaration aux autorités sanitaires et la prise de mesures de police sanitaire

Cycle biologique La bactérie Paenibacillus larvae est présente sous deux formes :

- la forme végétative (ou germinative) qui exploite les ressources nutritives de son milieu de développement et de multiplication ;

- la forme sporulée, en « dormance », particulièrement résistante dans le milieu. Concernant la résistance des spores, il a été montré qu’elles peuvent résister 35 à 40 ans dans le milieu extérieur sous forme d’écailles, plus d’un an dans le miel, et pendant 8 heures à 100°C de chaleur sèche. En revanche, elles sont détruites avec de l’eau de javel à 1,5%, ou en 30 mn à 130°C de chaleur sèche. Il est impossible de désinfecter efficacement la cire d’abeille sans la rendre inutilisable .

Le passage de la forme végétative à la forme sporulée se produit lorsque les conditions ne permettent plus le développement de la bactérie (épuisement des ressources, dessiccation…).

Le passage de la forme sporulée à la forme végétative se produit en condition favorable, en particulier au sein du tube digestif des jeunes larves, provoquant une mortalité importante. Lors de la contamination d’une colonie, on observe fréquemment un développement exponentiel de la maladie, provoquant à terme la mort de la colonie. La population adulte n’est pas renouvelée. Ainsi, la colonie est affaiblie et soumise aux dérives et aux pillages, ce qui a comme conséquence une propagation de l’agent pathogène vers les autres ruches et ruchers

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Facteurs favorisant la propagation De mauvaises pratiques zootechniques, lors de la formation d’essaims ou de regroupements de ruches ou de ruchers est un facteur majeur de propagation de la maladie entre les colonies. Le transfert de cadres, de hausses ou de cires non désinfectés permet la transmission de la maladie, les spores étant très résistantes dans le milieu extérieur . La contamination peut aussi se faire par apport alimentaire avec du miel ou du pollen contaminé par des spores de loques.

 

Diagnostic

les colonies fortement infectées sont dépeuplées, l’activité des abeilles est ralentie. Comme pour l’ascosphérose, on observe des cadres de couvain en mosaïque. Dans certaines alvéoles correspondant aux stades avancés, on observe de nombreuses écailles sèches, les « langues nymphales ». Les larves mortes acquièrent une grande viscosité. Un test permet un diagnostic rapide : une allumette ou une pince est plantée dans une cellule suspecte, puis retirée lentement ; la loque américaine provoque un étirement des tissus de la larve sur plus de 2 centimètres

Un résultat positif à ce test, associé à odeur nauséabonde caractéristique, et à la présence d’écailles noires adhérentes aux parois de l’alvéole, constituent conjointement un examen de confirmation de l’infection par l’agent de la loque américaine

Traitement

La destruction de la colonie infectée est la solution la plus sûre d’élimination de l’agent causal. Elle permet d’éviter la propagation du bacille aux autres ruches. Une alternative est proposée à travers les techniques de transvasement qui consistent à intégrer des colonies potentiellement contaminées dans de nouvelles structures désinfectées, tout en leur imposant un jeûne qui aurait pour effet de favoriser l’élimination du bacille. Les spores présentes sur la cuticule seraient ingérées par grooming et seraient détruites par les sucs digestifs des abeilles.

L’utilisation d’antibiotiques en antibiothérapie ou antibiocouverture est controversée. En France il n’existe pas d’AMM avec une indication pour l’agent de la loque américaine, mais des AMM existent dans d’autres pays comme les Etats-Unis ou le Canada. Les antibiotiques utilisés ne sont actifs que sur la forme végétative et ne permettent pas l’élimination de la forme sporulée. L’arrêt du traitement peut donc conduire à la réapparition des signes cliniques par germination des spores. L’utilisation d’antibiotiques n’est pas interdite, mais peut s’inscrire dans le cadre de la réglementation sur la cascade et des limites maximales de résidus. La tétracycline et l’oxytétracycline ont été utilisés dans ce cadre, mais ont conduit à l’apparition de souches résistantes à ces antibiotiques aux Etats-Unis et au Canada. 

Seules des mesures prophylactiques reposant sur des bonnes pratiques d’élevage permettent de minimiser le risque de contamination : désinfection du matériel, non introduction de produits à risques, observation fréquente des cadres de couvain et bonne gestion des divisions et regroupement d’essaims

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La varroase 

une maladie parasitaire La varroase est une ectoparasitose qui affecte les abeilles adultes et le couvain  Elle est provoquée par l’acarien Varroa destructor, qui se multiplie dans le couvain. La varroase est un facteur d’affaiblissement important et de mortalité pour les colonies. Elle est apparue en France en 1982. Il s’agit d’une maladie réglementée, classée comme danger sanitaire de deuxième catégorie pour les abeilles dans la réglementation française.

Ectoparasitisme des abeilles Les acariens ingèrent l’hémolymphe des abeilles adultes en perforant la membrane intersegmentaire située entre les segments abdominaux ou thoraciques. Les abeilles ainsi infestées montrent une durée de vie raccourcie, des changements de comportement et une sensibilité accrue aux maladies . La durée de vie des acariens sur les abeilles adultes dépend de la température et de l'humidité, elle peut varier de quelques jours à quelques mois.

Reproduction au sein du couvain :  La femelle pénètre dans une alvéole de couvain juste avant l’operculation . Le couvain de faux-bourdons est plus affecté que le couvain d’ouvrières. Après 2 à 3 jours, elle pond le premier œuf, généralement un mâle. Puis jusqu’à sept œufs, généralement femelles sont pondus les jours qui suivent. Les œufs éclosent et les parasites se développent en perforant l’enveloppe tégumentaire des larves pour se nourrir d’hémolymphe. Environ deux à trois acariens atteignent le stade adulte dans chaque cellule infestée. Le nombre d'acariens croît lentement au printemps, puis de façon exponentielle jusqu’à atteindre un taux maximum en fin de saison. C’est à ce moment que les signes cliniques de l'infestation sont le plus facilement identifiables. Le couvain est alors fortement réduit, au point de provoquer l’effondrement de la colonie. Si elles ne sont pas traitées, les colonies non hygiéniques d'abeilles domestiques parasitées par Varroa meurent au bout de 1 à 3 ans

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Les abeilles parasitées naissantes peuvent présenter une morphologie anormale, comme des ailes atrophiées ou encore un abdomen raccourci, secondairement à l’infection par le virus des ailes déformées et le virus de la paralysie aiguë, pour lesquelles les abeilles infestées développent une plus grande sensibilité. Ceci est imputable aux pertes d’hémolymphe et aux blessures infligées aux individus qui favorisent la contamination par les virus. Il a été montré que le varroa en est un vecteur actif et un activateur de la réplication virale.

Par son action spoliatrice impliquant une perte de protéines par ponction d’hémolymphe, l’acarien provoque une baisse d’immunité et un retard à l’émergence des jeunes abeilles. Varroa destructor est notamment un facteur favorisant de la loque européenne. Les abeilles naissantes montrent également des changements comportementaux divers (diminution des capacités de retour à la ruche, raccourcissement du stade nourrice) et leur durée de vie se raccourcit fortement

Facteurs favorisant la propagation

Le parasite se transmet d’une colonie à l’autre, entre colonies d’un même rucher, mais également entre colonies de ruchers différents. Cette transmission est favorisée par une trop grande promiscuité entre les colonies. Elle survient particulièrement lors de

- dérive des ouvrières qui portent des varroas phorétiques ;

- visite de faux-bourdons ;

- phénomènes de pillage.

Ainsi, plusieurs facteurs favorisants sont à éviter, notamment les fortes concentrations de colonies sur un même secteur, l’introduction de colonies ou essaims de statut sanitaire inconnu. Par ailleurs, tout stress est susceptible d’accroître la vitesse de développement de la varroase, en particulier :

- Les manipulations des ruches trop longues ou trop fréquentes ;

- Les mauvaises conditions climatiques comme le froid, le vent, les orages ;

- Le manque de provisions nécessaires aux colonies, en nourriture et eau.

 

Diagnostic

L’acarien femelle possède un corps plat et ovale approximativement de 1,1 mm × 1,5 mm, et est de couleur brun-rougeâtre. Il s’agit du seul parasite commun de l’abeille qui puisse être observé à l’œil nu.

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Par l’examen du couvain

l’observation du couvain de faux bourdon, ou du couvain d'ouvrières si celui-ci n’est pas présent : A distance, il est fréquent d’observer un couvain en mosaïque. Après avoir désoperculé les cellules de couvain, le contenu des alvéoles peut être lavé directement à l’eau et recueilli à l’aide d’un système de passoires, permettant l’observation des éventuels parasites sur un fond clair. Des acariens encore accrochés peuvent aussi être observé dans le fond des cellules ainsi nettoyées. En particulier, il est possible de mettre en évidence la présence de :

- Femelles fondatrices de couleur brun-rougeâtre ;

- Protonymphes et deutonymphes de couleur blanche ;

- Cadavres de larves d’abeille de couleur marron clair à brun, avec absence du caractère filant de la loque américaine ;

- Cadavres de nymphes desséchés ;

- Abeilles ou nymphes mortes avec les ailes déformées sous l’opercule dans les alvéoles ;

- Abeilles mortes lors de la sortie de l’alvéole avec sortie d’une partie du corps.

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Par l’examen des débris

Un grillage dont les mailles laissent passer les acariens Varroa est placé sur le plateau de la ruche, qui doit être recouvert de graisse afin que les acariens se collent sur celui-ci. Dans une ruche infestée, les débris produits en fin de la saison contiennent essentiellement des acariens facilement observables

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Par l’examen des abeilles

L’observation d’abeilles aux ailes déformées et/ou atrophiées, ou à l’abdomen rétréci est un examen d’orientation. Seule l’identification directe du parasite (femelles phorétiques) sur les abeilles conduit au diagnostic de certitude. Une technique nécessite de sacrifier un certain nombre d’ouvrières puis de séparer les parasites des abeilles à l’aide d’un tamis. Plusieurs espèces d’acariens ou d’insectes (poux) peuvent être identifiés sur les abeilles, mais ceux-ci sont facilement reconnaissables.

Traitement

Les larves de varroas situées au sein du couvain operculé sont à l'abri des traitements chimiques. Ils permettent une recontamination de la colonie si le traitement effectué n’est pas assez rémanent ou n’est pas renouvelé. La ruche doit donc être traitée sur une durée supérieure au cycle de développement de l'abeille, et, si possible, sur une durée de plusieurs cycles de développement . Les traitements ponctuels doivent donc être répétés, ce qui nécessite une multiplication des interventions impliquant de nombreux stress pour les colonies.

Une alternative consiste en l’utilisation de traitements rémanents. Les traitements rémanents sont effectués préférentiellement lorsque le couvain est diminué, le miel récolté, et sont laissés en place le temps nécessaire.

Plusieurs molécules sont disponibles sur le marché :

- L’amitraz (APIVAR), sous forme de lanières, sur prescription ;

- Le tau-flavulinate (APISTAN), sous forme de lanières, sur prescription ;

- Le thymol (APIGUARD, THYMOVAR), en pâte, sous forme de barquettes ; Seule cette dernière molécule est tolérée dans l’apiculture biologique.

Les traitements ponctuels disponibles sont :

- L’acide oxalique, en cristaux, à préparer sous forme de sirop ;

- L’amitraz (TAKTIC), en solution, par évaporation sur lange, efficace pendant 24 heures environ, sur ordonnance.

Les autres traitements acaricides, le brompropylate (FOLBEX), la fluméthrine (BAYVAROL), le coumaphos (ASUNTOL, PERIZIN), sur ordonnance, ne présentent pas d’efficacité intéressante par rapport à l’amitraz, et ont l'inconvénient de laisser des résidus dans les cires et dans le miel potentiellement toxiques pour le consommateur et l’environnement.

Les autres traitements à base d'autres acides organiques (acides formiques et lactiques) présentent une efficacité discutable. Ils présentent une toxicité remarquée, et un grand nombre de reines peuvent être perdues lors du traitement

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